Johnny par Laeticia : un documentaire émouvant mais aussi voyeuriste

Diffusion le 12 décembre à 20h30 sur RTL-TVI

“Si c’était à refaire, je referais la même chose”, déclare avec conviction celle qui a partagé les quelque vingt-trois dernières années de la vie de Johnny Hallyday. Cinq ans après la disparition du chanteur, décédé des suites d’un ­cancer le 7 décembre 2017 à Marnes-la-Coquette, Læticia ­Hallyday se livre à cœur à ouvert et dévoile des archives inédites. Des images qu’elle a, pour la plupart d’entre elles, filmées elle-même. Autant ­prévenir, de musique, il en est très peu question dans ce documentaire qui est diffusé par RTL-TVI (et sera disponible sur RTL Play) à la veille de la très attendue expo Johnny Hallyday - l’exposition qui se tiendra du 20 décembre au 15 juin au Palais 2 des Expositions à Bruxelles (Heysel).

L’histoire intime racontée ici débute en mars 1995, lorsque Johnny rencontre Læticia Boudou, âgée alors de vingt ans, lors d’un dîner à Miami. Elle se termine avec un rien de pathos sur des images de Læticia, de Jade et de Joy, les deux filles adoptives du couple, embrassant le cercueil de Johnny lors des obsèques à l’église de la Madeleine le 9 décembre 2017. En fond sonore, on entend Que je t’aime du chanteur. Guetté et disséqué par tous les médias, leur parcours a connu des hauts et des bas, à l’instar de la carrière artistique du Taulier. Læticia n’élude rien ici. Oui, son mari l’a trompée. Oui, il lui arrivait de boire plus qu’il ne le faut. Oui, l’ex-idole des jeunes souffrait de la solitude, de la peur du vide, de l’absence d’une figure paternelle. Au plus profond de ses angoisses, il a même joué à la roulette russe avec une vraie balle introduite dans une vraie arme à feu.

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Johnny papa poule

Mais il y a aussi l’autre versant qu’on préférera retenir. Johnny le papa poule, Johnny à la maison, Johnny fier d’avoir fondé un foyer. Loin des paparazzis, ou ­presque, c’est aux États-Unis que la famille vit ses plus beaux moments, relatés ici sans trop de pudeur. On découvre un Johnny ému lorsqu’il prend pour la première fois dans ses bras Jade, sa première fille, dans un orphelinat au Viêtnam. Mêmes instants de bonheur avec l’arrivée de Joy. Johnny donne le bain. Johnny lit des histoires avant le dodo (“pas terrible ton bouquin, je vais te raconter autre chose”). Johnny joue aux cartes et râle parce qu’il perd. Johnny fait le clown en s’arrosant d’eau froide avant de plonger dans une piscine. Johnny fait du karaoké dans sa résidence privée. Johnny répond à une interview-vérité que Jade doit faire pour l’école sur le thème “Mon papa”. Johnny se promène à vélo à Venice Beach. Johnny fait la queue, anonyme, devant un stand de crèmes glacées pour régaler la famille. Très belle séquence aussi où le chanteur prend sa guitare acoustique et va chanter ­quelques morceaux de rock and roll au lycée français de Los Angeles où sont scolarisées ses filles. Les parents des élèves filment au smartphone. Les gosses tapent dans les mains, d’autres se bouchent les oreilles.

© Prod.

Une gamine qui n’allait pas rester

L’homme ne devait pas être facile à vivre. Læticia en a bavé d’autant qu’elle n’a pas toujours été appréciée dans l’entourage de Johnny. Jean-Claude Camus, producteur des grands spectacles de Johnny, est l’un des rares à pouvoir témoigner dans ce documentaire. Dans son interview, pourtant consensuelle, on sent l’amertume de celui qui a perdu beaucoup d’influence sur son poulain avec l’arrivée de Læticia. Pour lui, elle n’était pourtant qu’“une gamine qui n’allait pas rester longtemps”. Il s’est trompé. Læticia est restée. Elle a fait le tri dans les “parasites” qui tournaient constamment auprès de son époux et avait plus que son mot à dire dans certaines décisions artistiques. Læticia se déclare aussi à l’origine du rapprochement entre Johnny et son fils David ­Hallyday et des retrouvailles avec Huguette Clerc, maman du chanteur. C’est à son invitation qu’Huguette Clerc, devenue hémiplégique, emménagera ainsi à Marnes-la-Coquette avec la famille ­Hallyday, ainsi que l’arrière-grand-mère de Læticia.

On peut comprendre le parti pris de ce film inédit. Pendant cinq ans, Læticia a tout lu et tout entendu. Pour beaucoup, elle était la Yoko Ono de Johnny. Elle donne ici sa version. Elle occulte tout ce qui s’est passé avant leur rencontre. Elle n’évoque pas les problèmes d’héritage. Il y a pourtant une certaine gêne à découvrir certaines images, notamment celles du dernier concert des Vieilles Canailles, où Johnny ne tient même plus debout et doit être emmené à plusieurs reprises derrière la scène pour recevoir des piqûres de morphine. Devait-elle aussi montrer le lit où Johnny s’est éteint en soulignant qu’elle et ses filles ont dormi à ses côtés jusqu’à son dernier souffle? Certains garderaient ça dans la sphère privée. Pas Læticia.

https://www.youtube.com/watch?v=613ccRhb9kI