
Esterno notte, une très grande série historique sur Arte

Diffusion le 15 mars à 20h55 sur Arte
Les années 80 continuent d’avoir la cote au petit écran. Mais si outre-Atlantique, ce retour aux eighties a des airs de fantastique et d’ode au cinéma de Spielberg (avec entre autres le carton Stranger Things), “chez nous”, ce sont plutôt des fictions historiques ancrées dans la réalité d’une Europe hantée par le terrorisme qui tiennent en ce moment le haut du pavé. Plus terre à terre, ces séries néanmoins n’ont franchement pas à rougir de la comparaison. En effet, après l’excellente production belge 1985, axée sur les tueurs du Brabant wallon, le cinéaste italien Marco Bellocchio (Le traître) s’initie au format de la série avec Esterno notte pour donner sa version des faits sur l’enlèvement d’Aldo Moro, qui a changé le visage de l’Italie du XXe siècle.
1978. Dans un pays miné par des mouvements de violence et la montée des extrêmes, Aldo Moro, président de la Démocratie chrétienne, appelle à l’institution d’un gouvernement d’union nationale avec l’appui des communistes. La pilule passe mal auprès des démocrates, mais aussi au Vatican, et les radicaux ne décolèrent pas. Les actions violentes des Brigades rouges et de la Prima Linea se multiplient. Le 16 mars, alors qu’il est en route vers le Parlement pour obtenir un vote de confiance, Moro tombe dans une embuscade… Articulant son récit comme un documentaire minutieux raconté au jour le jour, Bellocchio agrippe son spectateur d’entrée de jeu par la gorge, conférant même à des dialogues d’alcôve entre Moro et son épouse des allures de thriller captivant. Prenant le contre-pied de son film Buongiorno, notte où l’affaire Moro était vue à travers les yeux d’une activiste des Brigades rouges, c’est toute l’Italie qu’il interroge en profondeur, du “lambda” (Agnese, la fille de Moro, des révolutionnaires) aux plus hautes autorités de l’État (le pape, les politiques), pour comprendre ce basculement. Mais au fil des épisodes prenants, c’est la tragédie qui se profile, entraînant ses personnages incarnés par la crème des acteurs italiens, dont l’inévitable Toni Servillo (La grande bellezza), comme des fétus de paille dans un destin qui les dépasse. Très grande série.