
Le film du jour: Edmond

Diffusion le 4 janvier à 20h25 sur La Une
Avec son nez grand comme un pic, comme un cap, comme une péninsule, sa “tchatche”, sa force herculéenne, son courage, son indépendance, ses colères homériques, sa grande gueule pestant tant et si fort pour cacher le cœur de moineau qui l’abrite et dont les mots parfois plus légers que l’air parlent d’amour comme personne, jusqu’à s’élever au balcon de la belle Roxane qu’il aime en secret, Cyrano de Bergerac, le fier Gascon, est le héros du répertoire théâtral français que tout acteur digne de ce nom rêve un jour d’interpréter.
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Seulement, l’aura immense de la créature Cyrano a fait de l’ombre à son auteur, Edmond Rostand. Au point presque de l’effacer des tablettes de l’Histoire… Dramaturge prodige, Alexis Michalik,38 ans à peine au compteur, a remis la pendule au salon, célébrant lui aussi Cyrano dans sa pièce de théâtre Edmond, mais à travers cette fois, enfin, l’histoire (romancée) de son auteur, Edmond Rostand. Après un carton et 5 Molière, Michalik, l’adapte au cinéma lui-même pour lui donner une nouvelle vie.
Nous sommes en 1897, Rostand est en panne sèche d’inspiration depuis deux ans et le grand comédien Constant Coquelin (impérial Gourmet dans un de ses plus grands rôles de composition) lui commande une comédie héroïque pour relancer sa carrière. On le comprend vite, Rostand ne dispose que de quelques semaines et les imprévus, les démêlés sentimentaux et artistiques avec ses producteurs corses, ses acteurs, sa muse et sa femme trouveront place dans son grand œuvre qu’il est en train d’écrire. À la manière de Rostand s’inspirant de l’écrivain Savinien Cyrano de Bergerac pour créer son Cyrano, le Rostand du film transpose des éléments de sa vie, dont une dispute inventée avec Feydeau, pour créer sa pièce en 5 actes, Cyrano de Bergerac! Méta, vous avez dit?
Mêlant avec une fluidité étonnante le faux, le vrai et le presque réel, Michalik construit un film-gigogne aussi passionnant que délectable, et un hymne jubilatoire au théâtre, à Cyrano, au plaisir fou de jouer, à la création. Essentiel, à l’heure où de drôles de zigues ont décrété que la culture était un métier non-essentiel.