Les adieux de Roger Waters au Sportpaleis d’Anvers: de l'émotion, des tubes et du trash

A 79 ans, Roger Waters, fondateur de Pink Floyd, a joué pour la dernière fois en Belgique. Un concert qui a tenu autant de la célébration que du meeting politique.

Les adieux de Roger Waters au Sportpaleis d’Anvers:  de l'émotion, des tubes et du trash
Roger Waters a fait ses adieux scéniques ce dimanche au Sportpaleis. Crédit. Erc Guidicelli.

L’histoire retiendra que c’est avec la chanson Outside The Wall, que Roger Waters a conclu son tout dernier concert belge ce dimanche 14 mai au Sportpaleis d’Anvers. Ce n’est pas un hasard. Ce titre clôturait déjà "The Wall", double album et chef-d’œuvre de Pink Floyd (1979) qu’il avait entièrement composé. Un morceau servant à illustrer "que les hommes sont nés avec une aversion naturelle de la violence", a-t-il expliqué dans une interview. Après plus de de deux heures d’un show divisé en deux parties, Roger Waters, 79 ans, se trouvait alors au piano alors que ses musiciens tournoyaient sur la scène centrale avec leurs instruments acoustiques avant de disparaître dans la pénombre du backstage, des caméras les suivant dans leur lente et ultime procession.

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Grands classiques

Ce dimanche, pour cette étape belge de sa tournée d’adieux This Is Not A Drill, le bassiste anglais a donné à ses fans ce qu’ils espéraient. Soit un best of généreux. Avec les grands classiques qu’il a signés pour Pink Floyd (dix-sept morceaux au total), groupe qu’il a cofondé avec ses potes de lycée en 1965 et quitté à grands fracas vingt ans plus tard. Passant de la basse, son instrument de prédilection, au piano ou à la guitare acoustique, il a aussi joué des extraits de sa discographie solo, ainsi qu’un nouveau titre, The Bar, écrit pendant la pandémie. Le tout, servi par une scénographie renvoyant aux grands thèmes de ses chansons (l'isolement, l'aliénation, les dérives du capitalisme, le matérialisme) et à ses engagements politiques, un son cinq étoiles aussi pur qu’un rendu dans un studio high-tech et des musiciens de haut niveau. Mention spéciale pour ses deux choristes féminines Shanay Johnson et Amanda Belair, le saxophoniste Seamus Blake, ainsi que pour les deux guitaristes Jonathan Wilson et Dave Kilminster).

D’emblée, Roger Waters entend mettre les choses au point. "J’ai deux messages", annonce-t-il. "D'abord, coupez vos smartphones. Ensuite, si vous faites parties de ces gens qui "aiment Pink Floyd mais ne supportent pas les prises de position de Roger Waters", alors foutez-le camp illico au bar." Nous voilà prévenus. C’est avec quatre extraits de "The Wall" que le concert débute : Confortably Numb (avec une brève mais poignante partie à l’orgue), The Happiest Days Of Our Lives, Another Brick On The Wall, Part 2 et Part 3. La première partie est aussi l’occasion d’un vibrant hommage à Syd Barrett, premier leader de Pink Floyd disparu en 2006, sur le magnifique Whish You Were Here. Autre climax du show, l’interprétation de Sheep, sommet du rock progressif tiré d’"Animals", avec au-dessus de la scène centrale et du public un mouton géant qui sera suivi un peu plus tard du gros cochon volant, synonyme d’avidité.

Roger Waters au Sportpaleis. Photo Eric Guidicelli

Déluge d’images violentes

La scène centrale en forme de croix permet d’apprécier le concert sous des points de vue différents. Mais lorsque Waters se trouve de dos, on a tendance à se focaliser sur le grand écran, lui aussi en forme de croix. Et ce qu’on voit est souvent trash. Pour illustrer ses morceaux les plus engagés tirés de ses albums solo, mais aussi pour certains classiques de Pink Floyd (notamment Us And Them), Waters choisit de surligner son discours pacifiste, antiraciste et anticapitaliste aves des images de misère, de leaders accusés de crimes de guerre (en gros, tous les dernies présidents des Etats-Unis), d’exécutions sommaires, de drones qui explosent sur des cibles civiles et autres matraquages en règle… Est-ce bien utile? On ne sait pas si le public est vraiment venu pour ça. Plus émouvantes sont les archives des premiers pas de Pink Floyd dans le Swinging London du milieu des années soixante.

Célébration et prise de position

De retour après une pause de vingt-cinq minutes, Waters alterne encore deux titres très rock de "The Wall" (In The Flesh, Run Like Hell) et deux de son dernier disque solo (Déjà Vu, le désespéré Is This The Life We Really Want ?) avant de s’attarder longuement sur le classique des classiques "The Dark Side Of The Moon". Ce passage d’une grande musicalité, où il enchaîne Money, Us And Them, Any Colour You Like, Brain Damage et Eclipse, constitue le sommet de ce concert dont on a apprécié davantage l’esprit de célébration que l’étalage des convictions.

Roger Waters au Sportpaleis. Copyright Eric Guidicelli.

 

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