
Pixies : « Nous gardons le sens de l’aventure et cette philosophie punk de nos débuts »

Avec son mélange irrésistible de rock indé, de pop lo-fi, de folk déguisée et de textes surréalistes nés de l’imagination de son cerveau Black Francis, “Doggerel”, huitième album des Pixies paru cet automne, confirme ce que nous avions ressenti à l’occasion de leur double passage à Rock Werchter et Hear Hear! Trente-six ans après sa création à Boston, le groupe est animé d’une nouvelle dynamique. Une bonne raison, parmi d’autres, de les revoir ce 7 mars à Forest National.
Depuis son home studio de Burbank, en Californie, le batteur David Lovering nous avance trois explications à ce regain de fraîcheur. “Comme tout le monde, nous avons été cloîtrés chez nous pendant deux ans. Quand nous sommes repartis en tournée, on s’est rendu compte à quel point cette vie bohémienne sur la route nous manquait et ça a décuplé notre énergie sur scène. La pandémie a aussi changé nos habitudes. On a pu travailler chacun de notre côté sur les compositions qui allaient former “Doggerel”, alors qu’avant on répétait ensemble. Ça nous a permis d’amener les chansons encore plus loin. Tom Dalgety, qui avait déjà produit nos trois disques précédents, a aussi fait un boulot énorme pour reconstituer le puzzle en studio. Il y a eu plus de lâcher-prise de la part du groupe. On va dire que c’est la maturité (rire).”
Nous sommes devenus de meilleurs musiciens.
Présent depuis les premiers balbutiements des Pixies dans les clubs du Massachusetts en 1986, David Lovering peut mesurer le chemin parcouru. Sept années d’ascension et quatre disques cultissimes (“Surfer Rosa”, Doolittle”, “Bossa Nova, “Trompe le monde”) avant une séparation houleuse en 1993. Un long break mis à profit par David pour entamer une carrière de… magicien. Des retrouvailles euphoriques en 2003 et des tournées à rallonge pour imposer une nouvelle discographie à un public où se mélangent désormais fans de la première heure et jeunes mordus de sonorités noisy. “On joue dans des salles plus grandes qu’à l’époque de nos premiers albums que tout le monde considère aujourd’hui comme des classiques. On ne fait plus de trajet en van ou de répétitions dans le garage de mes parents. On loge dans de meilleurs hôtels. C’est plus confortable. Je pense aussi que nous sommes devenus de meilleurs musiciens. Quelque part, on s’est davantage professionnalisés durant la deuxième période du groupe. Mais d’un autre côté, nous gardons le sens de l’aventure et cette philosophie punk de nos débuts. Le matin, quand on se lève, nous ne savons pas quelles chansons on va jouer le soir, quelle reprise de Neil Young nous aurons envie de proposer au rappel. Aucun concert des Pixies ne ressemble à un autre. Le public est surpris, notre entourage est surpris et c’est l’inconnu pour nous aussi. Tout ça nous permet de garder notre enthousiasme intact.”
Surfer Rosa et U2
“Surfer Rosa” (1988), avec les hymnes Bone Machine, Cactus (que Bowie reprendra sur “Heathen” en 2002) ou l’inusable Where Is My Mind? reste l’album des Pixies préféré de David Lovering. “On avait vingt ans. On découvrait le studio avec nos maquettes primaires et notre matériel pourri. Pourtant, les chansons gardent toute leur force aujourd’hui.” Un concert qu’il n’oubliera jamais? “Pixies a assuré la première partie de la Zoo TV Tour de U2. Le 17 mars 1992, on jouait dans notre ville de Boston, au Garden, une salle où on s’attendait à être accueillis comme des dieux par tous nos potes et voler ainsi la vedette à Bono and Co. En fait, c’était le jour de la Saint-Patrick. Il n’y avait que des Irlandais, tous habillés en vert. Tout le monde s’en foutait des Pixies. Une belle leçon d’humilité.”
Le 7/3, Forest National, Bruxelles.