Nicolas Bedos à propos de son film Mascarade : «J’ai toujours été fasciné par les gens qui mentent»

Nicolas Bedos signe une Mascarade où les mensonges s’empilent comme des poupées russes.

Nicolas Bedos et Isabelle Adjani sur le tournage de Mascarade
Nicolas Bedos et Isabelle Adjani sur le tournage de Mascarade. © DR

“Mascarade, nom féminin: désigne un divertissement où les participants sont déguisés ou masqués. S’applique aussi à des actions ou manifestations hypocrites”. Si l’on excepte OSS 117: Alerte rouge en Afrique noire (2021), seul film qu’il n’a pas écrit, tous les films de Nicolas Bedos tournent autour d’une même thématique: le mensonge et ses multiples “dérivés”: l’imposture et l’illégitimité. Que ce soit dans Monsieur & Madame Adelman (2017) ou La Belle Époque (2020), il est question chez lui d’une réalité trafiquée. Mascarade n’échappe pas à la règle, qui met en scène un couple d’escrocs opérant dans les milieux friqués de la Côte d’Azur.

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Entre Adrien (Pierre Niney), qui vit aux crochets d’une comédienne dont la carrière est derrière elle (Isabelle Adjani), et Margot (Marine Vacth), une voleuse aux fêlures aussi profondes que secrètes, naît une passion amoureuse, mais aussi le projet de ferrer un promoteur immobilier (François Cluzet) pour qu’il quitte sa femme et épouse Margot dans l’unique but d’un juteux divorce. Le vent ne va bien sûr pas tourner comme leur météo le prévoyait. Mais en tombant, les masques vont révéler non pas les vrais visages qu’ils dissimulaient mais d’autres ­masques plus inquiétants encore.

J’ai toujours été fasciné par les gens qui mentent, nous confie Nicolas Bedos. Ils ont quelque chose de créatif. Et puis il y a aussi mon goût pour le théâtre de Goldoni, de Marivaux, pour les gens qui se déguisent. C’est quelque chose qui m’a diverti depuis que je suis petit. Je me déguisais quand j’étais petit, je prenais des accents. La Côte d’Azur est comme mon film et mes personnages. Même si elle a été défigurée, on peut encore voir qu’elle a été très belle et qu’elle a encore de la magie. C’est la métaphore du film. Les personnages ­ressemblent vraiment au décor. Mais le mensonge me fait aussi très peur. J’ai toujours eu peur de l’imposture. Ça me séduit et en même temps, ça me fait peur.

Parfum d’Été meurtrier

Derrière ses allures de film noir et de satire, Mascarade est un film qui tourne autour de la vengeance des ­femmes. Alors que les hommes n’en mènent pas large, les héroïnes de Mascarade s’en sortent la tête haute. “C’est un film sur la colère des femmes, reconnaît le réalisateur. En fait, je pense que j’écris des rôles plus forts pour ce qui me passionne le plus au monde, à savoir les femmes. Je passe ma vie à m’intéresser aux femmes et ça se voit un peu dans mes films. C’est Fanny Ardant dans La Belle Époque, Doria Tillier dans Monsieur & Madame ­Adelman. J’ai écrit Mascarade juste avant l’affaire #MeToo, et donc ce film a une autre “saveur” aujourd’hui qu’il sort sur les écrans. C’est quand même l’histoire de femmes qui se vengent et font payer aux hommes ce que d’autres hommes leur ont fait vivre.

En haut de l’affiche, la comédienne Marine Vacth est sublime dans le rôle de Margot, une femme qui marche sur un fil entre raison et folie, un rôle qui rappelle de manière troublante certaines compositions passées d’une autre star de Mascarade: Isabelle Adjani. “Il y a quelque chose d’assez fascinant, un effet miroir. Mon film, c’est un peu L’été meurtrier de Marine Vacth. Elle a un génie en elle qui peut rappeler celui d’Isabelle jeune. Je pense que la ­qualité première de Mascarade, c’est Marine Vacth. Elle a quelque chose d’iconique, je n’ai pas vu ça depuis très longtemps. J’ai rarement vu quelqu’un qui crève l’écran avec autant de force et de personnalité.

Dans les jeux incessants que le film organise entre vrai et faux, il arrive un moment où c’est par un roman que la vérité éclate. Ce qui n’est pas anodin dans le parcours de Nicolas Bedos. “Le roman, c’est ce qu’il y a de plus intime, confesse-t-il. Mascarade et La Belle Époque étaient des romans à la base, que je n’ai pas réussi à terminer. Ce que je trouve terrible et fascinant dans la littérature, c’est qu’il faut peu de moyens, un stylo et du papier, pour pouvoir mettre à nu les personnes qui nous entourent. Avec un roman, j’étais parti pour plusieurs centaines de pages et je me perdais dans beaucoup trop de descriptions psychologiques. Quand j’écris un film, je pense au public et je me dis: là il faut passer à autre chose. Je suis pris par une contrainte qui me permet d’aller au bout d’un film quand je ne suis pas capable d’aller au bout d’un livre.

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