Les séries télé font-elles de nous des alcooliques?

Omniprésent dans les séries, l'alcool endosse parfois les premiers rôles. Ce qui n'est pas sans conséquence sur notre propre consommation.

Quand les séries nous incitent à boire.

Don Draper de Mad Men a contribué au retour flamboyant du Old Fashioned. Les héroïnes de Sex And The City trinquent au Cosmopolitan. Barney est le plus gros consommateur de Duff dans les Simpson. Cersei Lannister est inséparable de son verre de vin dans Game of Thrones. Les fêtes étudiantes des séries américaines ne seraient rien sans leurs fameux gobelets rouges aux mystérieux contenus… Les séries sont imprégnées d'alcool, parfois jusqu'à l'excès. Et ce spectacle aurait une certaine influence sur notre propre consommation, surtout chez les jeunes.

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Binge watching rime avec binge drinking

Comme pour le tabac, plusieurs études ont démontré le lien entre l'exposition à l'alcool dans les médias et l'augmentation de la consommation d'alcool. 38.000 adolescents ont ainsi été divisés en deux groupes, l'un étant exposé à une série télévisée où des personnages consomment de l'alcool, l'autre à une série présentant aucun alcool. Résultat: les premiers avaient par la suite des attitudes plus favorables à la consommation d’alcool et rapportaient davantage d’intention de consommer de l’alcool dans le futur, indique The Conversation.

Cette influence peut s'expliquer notamment par un processus d'imitation. Pour objectiver l'impact de ces placements de produits sur le comportement des adolescents, des chercheurs américains ont réalisé en 2016 un sondage auprès de 2.600 jeunes, âgés de 15 à 20 ans. Sans surprise, leurs marques préférées sont celles qui mises en avant dans les séries les plus regardées. De plus, les jeunes qui s'adonnaient au binge-watching étaient également ceux qui faisaient preuve d'un rapport plus problématique avec la boisson.

Tyrion Lannister dans Game of Thrones

L'alcool est partout et souvent positif

D'autres études se sont penchés sur la fréquence de l'alcool à la télévision, et son impact. En France, des chercheurs du laboratoire Health Services and Performance Research ont observé que, sur 180 épisodes analysés, plus de 87% d'entre eux mettaient en scène des produits alcoolisés. Dans près de 38% des cas, les dialogues associés à l'alcool sont positifs, contre 32% de dialogues neutres et 30% de négatifs. Ce phénomène n'est pas nouveau: entre 1949 et 1989, près de 90% des films mettent en scène des événements impliquant de l’alcool. Celui-ci est souvent introduit de manière flatteuse. Dans 43% des cas, les personnages qui boivent y sont dépeints comme étant physiquement et socialement attractifs. Malgré leur addiction indéniable, au haut potentiel comique, Hank Moody de Californication ou Penny dans Big Bang Theory en sont la preuve.

Adieu l'alcoolisme honteux et solitaire. La boisson est aujourd'hui souvent associée au cool. Très haut dans le classement: le vin, présenté comme un accessoire de mode ou un marqueur social. 

Une exposition peu questionnée

Cette influence s'inverse-t-elle lorsque le ton employé est négatif? Les chercheurs du laboratoire français ont observé que l'exposition à des personnages consommant de l’alcool pouvait aboutir à des attitudes plus négatives envers l'alcool quand le ton du film était négatif et plus positives quand le ton du film était positif. « Lorsque le spectateur est attentif aux contenus qui lui sont présentés, des modifications dans les représentations de la désirabilité de l'alcool peuvent se produire si celui-ci est présenté dans des circonstances favorables, ce qui est le plus souvent le cas », souligne l'un d'entre eux Oulmann Zerhouni. Ces conclusions interpellent, alors que cet étalage éthylique est encore peu questionné, contrairement à la cigarette qui a pratiquement déserté les écrans en même temps que les lieux publics. L'alcool suit-il la même trajectoire?

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