[EXPO] Coxcie qui?

Pourquoi Michiel Coxcie, un des plus influents peintres du XVIe siècle, est aujourd’hui quasi oublié du grand public, même belge? La réponse au M-Museum Leuven. Souvent, le peintre Michiel Coxcie (1499-1592) se résume en un surnom: le Raphaël flamand.

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Et puis? Et puis rien. Pourtant, ce Malinois fut non seulement le grand peintre des Habsbourg, mais, affirment Koenraad Jonckheere et Peter Carpreau, les commissaires de la grande rétro présentée au M-Museum Leuven, “sans lui, l’art de Rubens n’aurait pas été possible”. Alors, ce désamour, la faute à qui, à quoi? Surtout à l’historien d’art Karel Van Mander. Dans son fameux “Schilderboek” de 1604, ce protestant pur et dur reproche au très catholique Coxcie de n’avoir fait que copier Raphaël. Ce jugement sera répété au long des siècles. “Une autre raison est le fait que les œuvres de Coxcie furent dispersées. Aux Pays-Bas ne sont restées que des œuvres de moindre qualité.” Il s’agit en effet de la production tardive d’un Coxcie qui mourut très vieux (93 ans) à Anvers. Dernière raison de ce grand oubli: un certain nationalisme flamand qui au XIXe siècle reproche à Coxcie de s’être trop inspiré de la Renaissance italienne, corrompant ainsi la grande tradition des primitifs et s’éloignant de l’âme de la Flandre.

 

Quatre cent vingt et un ans après la mort de Coxcie, le M-Museum Leuven remet donc les pendules à l’heure. La foisonnante diversité de l’œuvre du peintre flamand s’y déploie dans un parcours plutôt thématique. Pièces d’autel monumentales (La sainte parenté), peintures, dessins, gravures érotiques (Les amours de Jupiter), tapisseries, le tout venu des plus grands musées (British, Prado, Rijksmuseum, La Chartreuse à Douai, Gand, Bruges, Anvers, Berlin...), réactivent ce turbulent XVIe siècle souvent présenté comme un vide artistique (hormis Bruegel l’Ancien)  entre les “iconiques” primitifs flamands et le grand siècle de Rubens.

L’expo rend donc justice à Coxcie, formé dans l’atelier de Bernard van Orley à Bruxelles avant de se rendre en Italie où il fréquente Michel-Ange, travaille pour la basilique Saint-Pierre, rentre aux Pays-Bas où, devenu peintre préféré de Charles Quint, il réalise avec Titien des peintures murales pour le château de Binche, puis, à la demande de Philippe II, une copie (personnalisée) de l’Agneau mystique des frères Van Eyck. Dispersés depuis longtemps, leurs panneaux se trouvent à nouveau rassemblés ici pour la première fois. A ne pas rater non plus son spectaculaire David et Goliath, synthèse parfaite entre l’italianisme des visages et des corps et le réalisme flamand des détails et des paysages. On peut ne pas être sensible à cet art si éloigné de nous. Il n’empêche, c’est une véritable page de l’histoire de l’art qui se redessine ici. Une histoire dont toutes les subtilités seront sans doute encore mieux approchées au cours d’une visite guidée.

Jusqu'au 23/2. M-Museum Leuven, Vanderkelenstraat 28, 3000 Leuven. www.mleuven.be

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