Pourquoi les sportifs de haut niveau ne craignent pas l'asthme outre mesure

En règle générale, un traitement adapté permet aux asthmatiques de faire autant de sport que les autres. Cela leur permet même de mieux vivre avec leur maladie.

Alain Bernard
Le nageur Alain Bernard célébrant sa médaille d’or au championnat européen de natation à Budapest, le 13 août 2010 ©BelgaImage

Petite devinette: trouvez le point commun entre Justine Henin, David Beckham et Alain Bernard? Cela ne saute pas aux yeux, mais ces trois grands champions sont tous asthmatiques. Une caractéristique qui pourrait sembler incompatible avec leurs résultats et pourtant, ils sont loin d'être des exceptions. Comme l'a fait savoir à LCI Mathieu Téoran, secrétaire général de l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), "on considère que 30 à 70% de sportifs ont fait ou feront de l’asthme" selon les études. Car c'est un fait: sport de haut niveau n'est pas incompatible avec l'asthme, bien au contraire. C'est ce qu'ont rappelé plusieurs sportifs et experts lors d'un colloque organisé par l'institut spécialisé "Gregory Pariente Foundation" pour la journée mondiale de l'asthme en ce 2 mai, tout en expliquant les dessous de cette apparente contradiction.

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"L'asthme n'est pas une tare"

S'il y a bien une recommandation sur laquelle les médecins arrivent à se mettre d'accord, c'est pour dire que contrairement à l'idée reçue, l'exercice physique est un bienfait pour les asthmatiques. Elle permet d'améliorer la condition physique, cardiaque, musculaire et respiratoire de la personne concernée. Cela permet d'ailleurs d'être mieux armé en cas de crise d'asthme. À condition de bénéficier d'un traitement adapté supervisé par un médecin, il n'y a donc généralement pas de raison pour se limiter dans la pratique d'un sport.

Pour le recordman du monde d'endurance en aviron sur ergomètre Thomas Busser, touché par la maladie, "l'asthme n'est pas une tare". "J'ai constaté une baisse des symptômes et une baisse de l'occurrence des crises", assure-t-il. "Je pense que c'est un message important: il ne faut pas se sentir limité à cause de son asthme", souligne la pneumologue Camille Taillé, de l'hôpital Bichat à Paris. "Je voudrais redire aux jeunes asthmatiques: 'bougez!', parce que c'est bon pour votre asthme, pour votre santé. Faîtes-vous plaisir et fixez-vous des objectifs".

Les asthmatiques peuvent donc être tout aussi sportifs que les autres. Selon une étude Ifop, il s'avère même qu'ils sont 65% à pratique au moins une activité physique par semaine, soit plus que les non-asthmatiques (61%).

La nécessité d'être suivi médicalement

Évidemment, il n'est pas question ici de faire totalement abstraction de cette pathologie. Celle-ci doit être surveillée et traitée, notamment dans le sport de haut niveau. Alain Bernard ne le sait que trop bien. "Les symptômes se manifestaient surtout à l'entraînement, si les exercices étaient intensifs, parfois dans des anciennes piscines pas très bien ventilées", explique-t-il, tout en supposant que son exposition au chlore des bassins n'est pas étrangère à l'apparition de son asthme. "Quand le chlore se dégrade dans l'eau, il dégage un gaz, la trichloramide, qui stagne à dix centimètres de la surface, et nous les nageurs, c'est là que l'on respire pendant deux heures".

Résultat: aujourd'hui, le nageur français a besoin d'un traitement spécifique à base de ventoline qui est interdit pour les sujets sains puisqu'il améliore la capacité respiratoire. C'est ce même médicament que prenait Christopher Froome pour son propre asthme, d'où les alertes des contrôles antidopages qui l'ont finalement blanchi.

Parler pour être soigné

De manière générale, les pneumologues interrogés par la Gregory Pariente Foundation sont unanimes pour inciter chacun à parler de son asthme. "Le problème plus général est d'aider les jeunes à s'exprimer", estime Louis-Jean Couderc, ancien chef de pneumologie à l'hôpital Foch à Suresnes. "N'ayez pas peur de dire que vous êtes gênés pour respirer. Vous serez heureux en faisant du sport, bien soignés".

Françoise Pariente Ichou, responsable scientifique de la Gregory Pariente Foundation, conseille au micro d'Europe 1 de prendre ses précautions avant de pratiquer un sport. "Il faut avoir son traitement de secours sur soi. Il s'agit du petit inhalateur bleu. Il faut insuffler une à deux bouffées dix minutes avant l'exercice et on adapte l'effort à ce qu'on est capable de faire", explique-t-elle, tout en y ajoutant un échauffement progressif pour commencer.

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