Voici le temps surprenant que les hommes et les femmes consacrent à leur apparence

Une étude d'une ampleur inédite décortique l'influence de nos préjugés sur le temps que l'on passe à se préoccuper de notre apparence.

Femme se faisant belle face à un miroir
Une femme qui se préoccupe de son apparence face à un miroir ©BelgaImage

Vous pensiez que seules les femmes se préoccupaient vraiment de leur image ? Alors détrompez-vous ! Car comme le montre une grande étude publiée dans la revue "Evolution and Human Behavior", le souci de son apparence est un problème commun aux deux sexes. Chacun consacre près de quatre heures à cette tâche, avec une différence minime entre hommes et femmes (la gent féminine n'y dédiant que 23 minutes de plus). Et ce n'est pas le fait d'une culture ou d'un pays ! Présentée comme l'une des plus grandes recherches interculturelles menées jusqu'à présent, l'étude réalisée par une équipe internationale de scientifiques a pris en compte 93.158 ressortissants de 93 États. À la place, ils ont noté d'autres nuances très intéressantes pour en savoir plus sur le rapport de l'humanité avec la beauté.

Se préoccuper de son image, "un phénomène universel"

Au niveau global, rares sont les personnes qui ne se préoccupent guère de leur aspect. Seuls 0,003% des sondés ont déclaré ne rien faire pour améliorer leur apparence et 1% estime ne pas dédier plus de 10 minutes par jour à cette tâche. Dans les deux cas, un sexe n'apparaît pas surreprésenté par rapport à l'autre. "Ainsi, nous concluons que le comportement d'amélioration de la beauté est un phénomène universel", notent les chercheurs.

Un phénomène qui n'étonne pas ces derniers. Des études avaient déjà montré que les individus considérés comme plus attirants "sont souvent traités plus positivement, sont préférés comme partenaires potentiels et comme amis, sont perçus comme étant en meilleure santé et plus compétents, sont plus susceptibles d'être embauchés pour des emplois et de gagner des pourboires et des salaires plus élevés, sont plus populaires en tant qu'athlètes ainsi qu'en politique, et signalent un bien-être psychologique plus élevé et des niveaux de détresse et de dépression plus faibles". Bref, se faire beau ou belle, c'est du sérieux !

Les stratégies de chaque sexe pour trouver un partenaire

Les hommes et les femmes se distinguent néanmoins par leurs méthodes pour prendre soin d'eux-mêmes. Les premiers font par exemple plus d'exercices physiques que les deuxièmes. Selon les scientifiques, cela serait lié à l'idée "ancestrale" que les capacités et la force des mâles sont liées à leur forme physique, d'où une plus grande attractivité. "La masse musculaire sans graisse a également été associée au fait d'avoir plus de partenaires sexuels", précisent-ils.

Pour la gent féminine, l'étude note un comportement qui lui serait spécifique et qui se présente sous la forme d'un schéma en forme de U. Les jeunes adultes, qui sont plus en recherche de nouveaux partenaires, passent plus de temps à améliorer leur apparence, alors que les quarantenaires préfèrent faire d'autres activités. Mais une fois passé la barre des 60 ans, le souci de cacher les traces de l'âge prend le dessus et le temps dédié à l'apparence repart à la hausse. Les hommes ont de la chance: globalement, leur image est considérée comme moins affectée par le vieillissement, d'où le fait que ce schéma en U ne se retrouve pas chez eux.

 

Autre point intriguant: l'importance du statut conjugal. En moyenne, les personnes à la recherche de nouveaux partenaires "passent plus de temps à améliorer leur apparence que les célibataires (en moyenne 24 min de plus par jour), les personnes mariées (26 min de plus) et les personnes en couple (29 min de plus)". "Les résultats remettent en question les hypothèses précédentes sur l'amélioration de l'apparence en tant que tactique pour fidéliser les partenaires actuels", font ainsi remarquer les chercheurs qui relativisent l'importance de la compétition sexuelle et du prestige social.

L'importance des stéréotypes

Parmi les autres constats de cette étude, il y a le fait que les femmes venant de pays où l'égalité des sexes est plus faible se dédient davantage à leur image. L'article note même que cet effet est particulièrement "important" au niveau individuel (plus qu'au niveau national). Cela serait lié au fait que dans ces contextes plus traditionnels, les femmes doivent faire davantage d'effort pour correspondre aux stéréotypes qui leur collent à la peau. Elles sont alors plus susceptibles d'avoir recourt à une chirurgie invasive, notamment pour augmenter le volume des seins.

 

Les hommes ne sont pas épargnés par l'influence des stéréotypes. S'ils ressentent l'influence d'un milieu plus conservateur, ils peuvent notamment passer davantage de temps à développer les muscles du haut du corps, traditionnellement associés à la virilité. "Avoir un corps musclé pourrait être moins important pour les hommes qui ne se conforment pas aux rôles de genre stéréotypés", écrivent les scientifiques.

Au total, les personnes venant de pays moins égalitaires passent ainsi près d'une heure et demie en plus à améliorer leur attractivité, que ce soit chez les hommes ou chez les femmes, et cela peut monter encore plus haut quand les stéréotypes se retrouvent au niveau individuel. Il apparaît aussi que les ressortissants de pays plus collectivistes, comme ceux la Corée du Sud, suivent plus vigoureusement les codes de beauté. Le fait de venir d'un pays plus individualiste a moins d'influence sur le résultat final.

Réseaux sociaux, état de santé, niveau socio-économique, etc.

Les chercheurs notent toute une série d'autres facteurs. L'exposition aux médias joue par exemple un rôle fondamental. Il apparaît même que l'utilisation des réseaux sociaux est l'indicateur le plus important pour prévoir une accroissement du temps à se préoccuper de son image. La télévision a également un impact non négligeable. Le stress, les symptômes dépressifs et l'insatisfaction corporelle augmentent avec lorsque l'on est confronté à des images de mannequins, de personnes photoshopées, et de publicités pour des produits de beauté. Il est toutefois également possible qu'en sens inverse, les individus intéressés par leur image soient plus intéressés par les réseaux sociaux.

 

Les personnes avec des antécédents plus graves de maladies infectieuses ont également passé un peu plus de temps à se préoccuper de leur aspect corporel, surtout chez les hommes. Cela pourrait être lié soit à leurs efforts à cacher des imperfections (par exemple de l'état de la peau), soit au fait qu'il leur faille plus de temps que les autres pour se préparer (les hommes pouvant par exemple se mettre au maquillage mais avec plus de difficultés que les femmes).

L'étude note enfin que le temps consacré à l'amélioration de la beauté augmente chez les hommes lorsque leur statut socio-économique est plus élevé, alors que les femmes le font surtout lorsque leur niveau d'éducation est inférieur. Idem pour les personnes avec des convictions politiques de droite (mais uniquement chez les femmes). Pour le reste, le statut socio-économique, le niveau d'éducation et les convictions politiques n'ont que très peu d'influence.

Sur le même sujet
Plus d'actualité