

Le président français a choisi d'activer l'article 49.3 de la Constitution pour faire adopter la réforme des retraites à l'Assemblée nationale, après une réunion du conseil des ministres à l'Elysée. Le chef du parti socialise, Olivier Faure, a immédiatement dénoncé les "caprices" du président et les députés de l'opposition ont hué la Première ministre Élisabeth Borne lors de son arrivée au Parlement. Une tension palpable à la hauteur du risque pris par le gouvernement français, qui met avec le 49.3 sa survie en jeu.
L'article 49.3 permet une adoption du texte au Parlement sans vote préalable. En procédant de cette façon, la Première ministre évite de soumettre la réforme des retraites aux députés de l'Assemblée nationale, ce qui aurait normalement dû être fait ce jeudi à 15 heures. Contrairement au Sénat, qui a adopté la loi sans souci ce matin, il était beaucoup plus difficile pour Élisabeth Borne de faire de même à l'Assemblée nationale, la chambre basse du Parlement. En passant par le 49.3, elle fait sauter ce verrou de force.
Mais il y a un revers de la médaille à cette procédure. Si la réforme des retraites serait de facto adoptée sans le vote final des députés, le gouvernement s'expose ainsi au dépôt d'une motion de censure dans les prochaines 24 heures. La dernière fois que ce risque a été pris sur un projet de loi d'une telle ampleur avant le gouvernement d'Élisabeth Borne, c'était en 2020 par le cabinet d'Édouard Philippe. Il était alors déjà question de faire passer un texte sur les retraites, qui n'a finalement jamais été appliqué du fait de la crise du Covid.
Plus concrètement, le gouvernement s'expose aujourd'hui à une tentative de la coalition de gauche, la Nupes, ou du Rassemblement national (extrême-droite) de le renverser. Le parti de Marine Le Pen s'est déjà engagé à aller en ce sens dans l'hypothèse d'un 49.3. Selon le journal Le Monde, si cela se confirme, ces motions de censure pourraient être débattues ce week-end ou en début de semaine prochaine. Entretemps, cela laisserait le temps aux opposants à la loi de renforcer la contestation dans la rue, avec l'espoir que cela fasse reculer l'État.
Pour qu'une motion de censure soit adoptée, il faut qu'elle soit approuvée par 289 députés, soit la moitié de l'Assemblée nationale. Le parti présidentiel, Renaissance, dispose aujourd'hui de 170 sièges, et atteint un total de 250 députés acquis à sa cause grâce à son alliance avec deux partis, le Modem de François Bayrou et le parti Horizons d'Édouard Philippe. Dans l'hypothèse où le gouvernement ne perde aucun soutien parmi cette coalition, il lui faudrait encore obtenir 39 voix. Le parti de droite Les Républicains (LR) semble être le plus à même à remplir cette tâche, avec ses 61 députés. Cela dit, LR est aujourd'hui divisé sur son soutien à Élisabeth Borne, une faction du parti étant notamment opposée à la réforme des retraites. La Première ministre va par conséquent devoir s'assurer un maximum de soutiens au sein de LR, qui fait aujourd'hui office de faiseur de roi.