
Guerre en Ukraine: "Les chambres de torture de masse ont été financées par l’État russe"

Dans les colonnes du Guardian ce jeudi matin, Isobel Koshiw correspondante en Ukraine pour le journal, fait le point sur les conclusions d’une enquête menée à Kherson, ville occupée par l’armée russe durant huit mois, du 2 mars au 11 novembre 2022.
La lecture de votre article continue ci-dessous
Une équipe d’avocats ukrainiens et internationaux dirigée par un avocat britannique a recueilli des preuves à Kherson (sud de l’Ukraine) que les centres de torture russes n’étaient pas “aléatoires”. Ces enquêteurs, appelés Mobile Justice Team, affirment avoir enquêté sur 20 chambres de torture à Kherson. Selon eux, ces lieux étaient au contraire planifiés et directement financés par l’État russe pour “terroriser, soumettre et éliminer la résistance ukrainienne et détruire l’identité ukrainienne”.
Des plans pour 20 centres de torture
Les preuves recueillies comprennent les plans utilisés par les forces d’occupation de Vladimir Poutine pour établir, gérer et financer les vingt centres de torture, note le Guardian. Selon les avocats, plus de 1 000 survivants ont fourni des preuves et plus de 400 personnes ont disparu de Kherson. L’enquête n’a pas pu déterminer si ces personnes ont été tuées lors de l’occupation ou ont été emmenées en Russie.
”Les chambres de torture de masse, financées par l’État russe, ne sont pas le fruit du hasard, mais font plutôt partie d’un plan soigneusement pensé et financé, dont l’objectif est clairement d’éliminer l’identité nationale et culturelle ukrainienne”, a déclaré l’avocat britannique Wayne Jordash, qui dirige l’équipe
Les centres de torture étaient gérés par les services de sécurité russes, le FSB, ainsi que par l’administration pénitentiaire russe et des collaborateurs locaux, selon les avocats. Toute personne ayant un lien avec l’État ukrainien ou la société civile ukrainienne (militants, journalistes, fonctionnaires, enseignants) pouvait se retrouver dans un tel centre.
🡢 À lire aussi : Guerre en Ukraine : « Il faisait froid et sombre mais nous étions incassables. Nous avons vaincu la terreur hivernale »
D’autres victimes ont expliqué à l’équipe d’avocat avoir été arrêtées arbitrairement dans la rue avant d’être placées en détention parce qu’elles avaient des documents “pro ukrainiens” sur leur téléphone. Hommes et femmes auraient, toujours selon cette enquête, été passés à tabac et torturés par chocs électriques. Ils ont été contraints d’apprendre et de réciter des slogans, des poèmes et des chansons pro russes, selon l’équipe.
Selon Wayne Jordash, il reste peu de doute. “Le plan de Poutine est d’occuper l’Ukraine, de soumettre la population ukrainienne à la domination russe et de détruire l’identité ukrainienne. Ce plan se précise à mesure que les preuves de crimes de guerre se manifestent et que nos enquêtes progressent”, avance-t-il.
Des procureurs ukrainiens soutenus par des experts
Comme l'explique l'agence Reuters sur son site, les procureurs ukrainiens chargés des crimes de guerre travaillent avec des équipes de justice mobiles soutenues par des experts juridiques internationaux et des équipes médico-légales. Ils enquêtent sur les violations présumées du droit international depuis le 24 février 2022, date du lancement de l'invasion russe. Les enquêtes se déroulent pour le moment principalement dans le sud et l'est du pays, où des terres ont été reprises aux forces russes.