Climat : la technique qui fait trembler les entreprises polluantes

Des chercheurs ont pour la première fois prouvé l'efficacité des litiges climatiques pour affecter les actions en bourse des sociétés grandes émettrices de CO2.

Centrale thermique de Bełchatów
Fumée et vapeur à la centrale thermique de Bełchatów, considérée comme le plus gros pollueur d’Europe, le 20 octobre 2022 ©BelgaImage

À l'heure où le GIEC appelle à agir rapidement pour contrer le réchauffement climatique, des associations et des citoyens adoptent une nouvelle stratégie pour agir: attaquer en justice des entreprises particulièrement polluantes. Une tactique dont les effets sont non négligeables, à en croire une étude publiée cette semaine par la "London School of Economics and Political Science". Les auteurs ont en effet remarqué que même si la défense finissait par gagner, ces sociétés voyaient quand même leurs cours en bourse baisser. Un effet qui n'est que plus fort encore si la justice donne raison à la partie adverse.

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Les sociétés émettant beaucoup de CO2 encore plus touchées que les autres

Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont construit une solide base de données solide à partir de 108 poursuites judiciaires en matière de changement climatique. Ces affaires sont datées entre 2005 et 2021 et concernent des sociétés cotées soit aux États-Unis, soit en Europe. Les auteurs estiment qu'avec cette collecte d'informations, il est possible d'interpréter correctement "l'impact sociétal des litiges climatiques sur la valeur de l'entreprise, malgré la nature très hétérogène" de ces affaires.

Leur conclusion montre qu'il existe un lien de causalité clair et net entre ces recours en justice et les cours boursiers. Rien que le fait d'avoir un dépôt d'accusation ou une décision justice permet de réduire la valeur de l'entreprise visée de -0,41% en moyenne, qu'importe la nature de ces actes. Si la société concernée est une grande émettrice de CO2 (dans les secteurs de l'énergie, des services publics et des matériaux), la sanction est encore plus forte, avec une baisse de -0,57% lors d'un dépôt d'accusation. Et lorsqu'en plus de cela, ces entreprises polluantes sont sanctionnées par la justice, leurs actions chutent de 1,50%.

Plus l'affaire est inédite en son genre, plus la sanction est dure

Mais ce n'est pas tout! Selon l'étude, la dégringolade peut être encore plus forte encore. Les auteurs estiment en effet que les réactions les plus importantes sur le marché sont constatées lors de ce qu'ils appellent les "affaires nouvelles". Il s'agit d'affaires utilisant une nouvelle forme d'argumentation juridique, ou de situations où une affaire éclate dans une juridiction qui n'avait pas connu de tels cas auparavant. Autrement dit, en innovant un peu, les recours en justice marquent encore plus les esprits, d'où cette sanction particulièrement dure des marchés.

"Les résultats offrent les premières preuves solides" sur le risque encouru pour les entreprises visées, dans un contexte où de plus en plus d'associations les amènent devant des tribunaux, concluent les chercheurs. Cela "suggère que les prêteurs, les régulateurs financiers et les gouvernements devraient considérer le risque de litige climatique comme un risque financier pertinent dans un avenir plus chaud", assurent-ils.

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