Le tri des déchets alimentaires est désormais obligatoire à Bruxelles : bientôt dans toute la Belgique ?

Ce 15 mai, l’usage des sacs orange, pour les déchets alimentaires, devient obligatoire en Région bruxelloise. Les collectes des sacs blancs seront par ailleurs moins fréquentes. Ces changements devraient, pour partie, rapidement s’appliquer à toute la Belgique…

sac orange poubelle obligatoire pour le tri des déchets
La généralisation des sacs orange permettra de réduire la quantité de déchets incinérés de 40  %. © Bruxelles Propreté

“Tous les jours, un bon tiers de kilo.” Ceci n’est pas le slogan attaché à un nouveau régime minceur fort opportunément vanté par un magazine féminin en vue de l’été. Mais bien la quantité moyenne de déchets qui atterrit, par personne, dans nos sacs blancs. La taille de la pyramide d’ordures ménagères est trois fois plus importante. Les sacs blancs, bleus, jaunes, verts, ce que l’on va porter dans les bulles à verre et aux Recyparcs avoisinent les 500 kg. À Bruxelles, le tri alimentaire sera obligatoire à partir de la mi-mai. L’orange viendra s’ajouter au panaché de sacs qui décorent, certains jours, nos rues en attendant le ramassage. Qui n’aura lieu non pas deux mais une fois par semaine.

Nos dernières vidéos
La lecture de votre article continue ci-dessous

Ces innovations ne sont pas du goût de tout le monde. “On est plusieurs communes à le demander, à dire qu’on impose le tri des déchets organiques mais qu’on puisse maintenir les deux collectes durant un certain nombre de mois. Et puis évaluer la mesure, car les gens vont devoir s’habituer”, a fait savoir le bourgmestre de Woluwe-Saint-Pierre, Benoît Cerexhe (Les Engagés). Les forums des habitants de communes bruxelloises bruissent de mécontentements. À Saint-Josse: “Encore des taxes et des amendes grâce à Écolo et son ministre des poubelles, Alain Maron”. À Uccle: “Le porte-parole d’Écolo hier au conseil communal étant intervenu avec un ton de donneur de leçons pour justifier cette suppression de collecte et sans aucune empathie pour les citoyens qui demandaient et justifiaient le maintien de deux collectes de sacs blancs par semaine.

Un tri alimentaire européen

Selon Bruno Bauwens, député bruxellois PTB, la décision de supprimer une collecte de sacs blancs rendra la ville plus sale et compliquera la vie de la majorité des gens vivant dans des petits logements et ne pouvant pas stocker longtemps plusieurs sacs pleins. “À quelle logique répond ce nouveau tri alimentaire? répète Étienne Cornesse, le porte-parole de Bruxelles-Propreté. Mais à une obligation européenne qui doit être en vigueur, au plus tard, le 31 décembre 2023. La Région bruxelloise a simplement anticipé de quelques mois cet impératif légal. Le 1er janvier 2024, l’ensemble des Européens devront trier leurs déchets alimentaires. On est dans un processus dynamique européen qui va permettre effectivement une réduction importante des émissions de CO2.

Première rectification de taille par rapport aux critiques encourues par cette “réforme des poubelles”. Elle n’est pas le résultat d’une lubie d’un ministre Écolo. Il y a dix bourgmestres Écolo/Groen sur les 581 communes belges. Aucune intercommunale en charge de la gestion des déchets n’est sous tutelle Écolo (à part Bruxelles Propreté qui est une agence régionale et fait fonction d’intercommunale). Des dizaines d’intercommunales et des centaines de collèges communaux dirigés ou influencés par la N-VA, le Vlaams Belang, le Parti socialiste, Vooruit, le CD&V, l’Open VLD, le MR, les Engagés et le PTB devront s’atteler pour traduire dans les faits, avant le 1er janvier 2024, cette obligation européenne.

Par ailleurs, le “bon tiers de kilo” quotidien (en réalité, on est plutôt à 400 grammes) est composé à 40 % de déchets alimentaires. Que fait-on des sacs blancs? On les incinère. Retirer 40 % des sacs blancs revient à faire diminuer d’autant le CO2 émis lors de l’incinération de nos déchets. Un kilo de déchets brûlé génère 0,89 kg de CO2. Le tri alimentaire “orange” permettra à chaque Bruxellois d’éviter chaque année d’incinérer 58 kg de déchets. Soit 51 kg de CO2.

Appliqué au 1,2 million d’habitants de la capitale, c’est 62.070 tonnes de CO qui, annuellement, ne s’envoleront pas. L’équivalent de ce qu’émettent, chaque année, en moyenne 34.500 automobilistes (15.000 km/an). Appliquée à la Belgique (336.500 automobilistes à 15.000 km/an) et - mieux - à l’Europe (12,5 millions automobilistes), cette mesure peut réellement peser… Ces 40 % issus de ce nouveau tri alimentaire seront l’objet d’un traitement particulier. “Ces déchets sont envoyés dans un centre de biométhanisation. On peut avoir de la viande, du poisson, mais pas les arêtes et les os, les coquilles de moules et d’huîtres. Les éléments trop durs sont à mettre dans le sac blanc et pas dans l’orange. Ce processus va créer de la chaleur et de l’électricité. Ce qui restera à la suite de ce process, c’est du “digesta”, une sorte de compost qui servira à fertiliser les terres, notamment agricoles.

Moins de CO2, mais beaucoup plus d’électricité

Moins d’émissions de CO2, moins de consommation d’énergie fossile pour produire de l’électricité, moins de phosphates pour produire de l’engrais… Sur papier, ce nouveau tri possède toutes les vertus. Mais, dans cette réforme du ramassage de poubelles, ce qui fâche vraiment, ce sont les tournées. En particulier, la suppression d’une des deux tournées de ramassage des sacs blancs. “Les gens qui perdent une collecte de sacs blancs par semaine ont vraiment le sentiment qu’il y a une perte de service, reconnaît Étienne Cornesse. Mais combien de Bruxellois sortent deux fois par semaine leurs sacs blancs? La perte de service, elle est là, mais la majorité des Bruxellois - nous avons, bien entendu, étudié la question - ne l’utilise pas. En moyenne, le Bruxellois sort une fois par semaine ses sacs blancs, tous les quinze jours le sac bleu et toutes les trois semaines leur sac jaune.

poubelles

© BelgaImage

La fréquence de sortie des sacs blancs ne risque pas d’augmenter puisque 40 % du contenu de ceux-ci devrait se retrouver dans le sac orange. Par ailleurs, les nouvelles règles sur le PMC (les pots de yaourt ne sont plus à mettre dans le blanc mais dans le bleu) participent également à la “fonte” du contenu des sacs blancs. Quant aux nuisances que provoquerait la nécessité de stocker des poubelles trop longtemps chez soi, elles devraient être amoindries, voire inexistantes, grâce au découplage des tournées.

Le sac jaune, le sac orange, le sac bleu, le sac blanc

Ce découplage devrait, par ailleurs, permettre de répartir les charges parmi le personnel de première ligne. “Plusieurs équipes vont procéder aux ramassages, dont certains se feront en soirée de manière à minimiser les embarras de circulation. Par exemple, le lundi soir, on va collecter le sac blanc et le sac bleu, parce que le sac bleu est un sac “léger”. Le sac orange sera collecté avec le sac vert, ce sont généralement des tournées qui se font l’après-midi. Les sacs jaunes seront collectés en fin de semaine avec les sacs blancs (car toutes les “2e tournées” ne seront pas supprimées partout).” De fait, si les sacs orange ne sont pas collectés le même jour que les sacs blancs, les volumes de poubelles à stocker n’augmentent pas.

Un autre reproche adressé à cette réforme des poubelles est l’absence d’une campagne de communication qui informerait les habitants. “On a l’expérience des réformes précédentes en la matière. Si, aujourd’hui, on balance massivement les informations au sujet des nouveaux calendriers, il est certain qu’il y aura des gens qui, de bonne foi, vont sortir leurs poubelles aux mauvais jours. Cette réforme est effective le 14 mai au soir. Il convient de distribuer les calendriers de tournées dans les boîtes aux lettres juste avant cette date. Par ailleurs, les informations sur les nouveaux horaires sont disponibles sous forme de PDF sur le site internet de Bruxelles propreté.” Le conteneur orange dans lequel mettre son sac orange (10 cents/pièce) est fourni gratuitement par la commune de résidence.

Débat
Sur le même sujet
Plus d'actualité