
Succès fou des magasins Shein: n'existe-il vraiment pas d'alternatives responsables et abordables?

À Paris, en plein milieu du Marais, le 18 rue des Archives est une adresse très discrète par laquelle on accède par une petite porte. Mais depuis quatre jours, les jeunes Français s'y pressent. Pour cause: c'est là qu'est installée jusqu'à ce lundi 8 mai la boutique éphémère de Shein, la très polémique marque chinoise de vêtements. Ils attendent parfois plus d'une heure pour acheter des produits à des prix qui défient toute concurrence, souvent à moins de 15€.
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Et ce n'est pas un cas isolé. Selon Le Monde, des rassemblements similaires ont eu lieu à Toulouse, Montpellier ou encore Lyon. En juin 2022, une énorme file s'était également formée à Anvers pour un simple showroom de Shein. Pour l'instant, Bruxelles et la Wallonie n'ont pas vu débarquer de magasins sur leurs territoires mais il est très probable que l'engouement serait similaire si cela devait arriver. Un succès qui a amené les médias français à demander aux clients s'ils étaient au courant des controverses concernant leur nouveau chouchou et si oui, pourquoi ils continuent de s'y précipiter.
Le prix surpasse les autres considérations
Au micro du Parisien, les acheteurs se disent sans surprise surtout séduits par les petits prix de Shein. Une jeune fille cite par exemple une robe vendue moitié moins cher que dans un magasin lambda. Quand le média lui explique le lourd impact environnemental et humain de la marque, notamment soupçonnée d'exploiter des millions de Ouïghours enfermés dans des camps chinois, elle avoue ne pas être au courant et assure que cela peut avoir une incidence sur ses achats. "Vous allez partir de la queue?", lui demande la journaliste. "Non, pas à ce point", réplique la cliente qui précise qu'elle va néanmoins "y réfléchir".
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D'autres acheteurs semblent mieux renseignés sur le sujet, mais viennent quand même en boutique. C'est le cas d'une mère de famille qui évite d'aller chez Shein si ce n'est pour acheter ce que veulent les enfants de la famille. "Je n'ai pas les moyens d'aller vers les grandes marques qui ne font pas travailler les Ouïghours, et ce n'est pas de ma faute", répond une autre cliente. "Toutes les marques font de la fast fashion. Si je commence à ne pas acheter là ou là à cause de ça, je vais sortir dans la rue nue. Zara, ils font la même chose et ça n'empêche personne d'aller chez Zara".
Cet argument est revenu également sur les ondes de BFMTV qui interrogeait une femme présente à Paris. "Il y a ça dans un peu toutes les marques, avec les conditions de vie et la pollution, mais après on essaye de réduire", dit-elle.
Beaucoup de marques plus responsables que Shein
Il est vrai que Shein n'est pas la seule marque critiquable. Il n'empêche qu'elle garde quand même le bonnet d'âne, à en croire l'analyse du site indépendant "Good on You". Cette association australienne classe toutes les marques selon une note sur cinq prenant en compte l'impact environnemental, humain et animal. Sans surprise, Shein obtient la plus mauvaise cote et le site y accole la remarque "Nous évitons". Mais attention: ce très mauvais résultat n'est pas le monopole de l'ultra-fast-fashion. "Good on You" donne par exemple ce même un sur cinq pour Zadig&Voltaire, qui est pourtant classée parmi le prêt-à-porter de luxe. Parmi les autres marques avec cette note minimale, on trouve Naf Naf, Mexx, Lee Cooper, American Vintage et Morgan.
En comparaison, des magasins connus comme Zara et Bershka n'ont qu'une note de deux, avec la mention "pas assez bien". Idem pour Brice, Pull and Bear, Jules, Primark, Pimkie, Kenzo, Stradivarius, Oysho, Dior, Massimo Dutti, Louis Vuitton, Sandro, Maje, Asos, Etam, Versace, Desigual, Kiabi, Tom Tailor, Hugo Boss, Vila, Guess, Columbia, Diesel, Giorgio Armani, Banana Moon, Only, Marc O'Polo, Jack & Jones, Mango, s.Oliver, Hermès, Victoria's Secret, Ralph Lauren ou encore Chanel. On y trouve donc à nouveau autant des marques à bas prix que du luxe.
D'autres s'en sortent mieux, avec une note de trois sur cinq et une mention "C'est un début". C'est le cas de H&M et Uniqlo par exemple du côté des vêtements moins chers, ou de Nike dans les prix plus élevés. À noter que ces marques ont justement été boycottées par la Chine dès 2021 après avoir décidé de ne plus acheter de coton provenant du Xinjiang, là où se trouvent les camps exploitant les Ouïghours. Parmi les marques notées trois sur cinq par "Good on You", on trouve aussi Burberry, Saint Laurent, Tommy Hilfiger, Marks & Spencer, Esprit, Levi's, Cos, Superdry, Adidas, Puma, Vero Moda, Calvin Klein.
Du côté des notes les plus élevées, "Good on You" cite plus des magasins peu connus du grand public. Citons quand même parmi les quatre sur cinq des marques comme Patagonia et Mochi, ainsi que Rapanui dans les cinq sur cinq.