Les supermarchés, symbole de la crise : pourquoi le prix de votre caddie n'est pas près de diminuer

Le prix du caddie est toujours en hausse, notamment parce que distributeurs et fournisseurs augmentent­ leurs marges ou utilisent leurs liquidités pour investir. Le ­consommateur reste le dindon de la farce.

faire ses courses dans un supermarché
Une famille de deux personnes débourse en moyenne 503 euros par mois pour ses courses. C’est 79 euros de plus qu’en janvier 2022. © BelgaImage

Les tickets de caisse piquent les yeux. Certes, la hausse record des prix de 20 % observée en décembre est derrière nous, mais ils poursuivent tout de même leur montée. Une famille de deux personnes, estime Test Achats, débourse désormais 503 euros par mois pour ses courses. Cela représente en moyenne 79 euros de plus qu’au mois de janvier 2022, et 6 euros de plus qu’en décembre dernier. Ce sont surtout les huiles, les œufs et le lait qui font encore mal au ­portefeuille. L’indexation automatique des salaires a beau avoir fait respirer nos comptes en banque, si les prix des denrées continuent à augmenter, le soulagement ne sera que temporaire. “Des ­discussions que j’ai avec le secteur, les prix ne vont pas baisser prochainement”, avertit Christophe Echement, fondateur de l’application PingPrice. Il va jusqu’à annoncer une “nouvelle vague de hausses des prix dans les supermarchés en mars ou en avril”.

La raison est simple: les négociations entre les fournisseurs/producteurs de produits alimentaires et les distributeurs sont tendues, car chacun préférerait que l’autre assume l’explosion des coûts de l’énergie et des matières premières. De plus, observe-t-il, les deux groupes en profitent pour augmenter leurs marges. Le consommateur en est le dindon de la farce à la caisse. “Les supermarchés veulent garantir leurs marges et refusent de faire des efforts. Les fournisseurs sont donc les perdants, sauf peut-être certaines grosses ­marques qui ont plus de poids comme Coca-Cola.” Christophe Echement prend l’exemple d’un pot de confiture à 1 euro l’an dernier, vendu à 1,20 euro aujourd’hui. “La véritable augmentation serait de 14 centimes. Le distributeur profiterait de l’inflation pour augmenter sa marge de 4 centimes tandis que le fournisseur le ferait de 2 centimes. On est dans cet ordre de grandeur.” Le consommateur paie donc dans cet exemple 6 centimes de plus que ce qu’il devrait réellement payer à cause de l’inflation.

Pauline Neerman, représentante de RetailDetail, confirme cette tendance à augmenter les marges. “Certains grands acteurs, notamment du côté des fournisseurs, ne connaissent pas une baisse significative au niveau de leurs marges. Pourtant, ils augmentent les prix. Cela étant dit, depuis quelques mois, personne n’échappe totalement à la crise.” Pas le choix… Les Belges doivent s’adapter. Au point que, selon ING, 16 % des mé­nages ont diminué leurs dépenses quotidiennes en nourriture. De la même manière, les magasins bio peinent de plus en plus à convaincre tandis que les enseignes du hard discount comme Lidl et Aldi voient leur clientèle gonfler. La preuve que dans la crise, il y a les gagnants et les perdants. Les ménages font partie du second groupe.

Vers le super-supermarché?

La grande distribution est en pleine métamorphose. La reprise du groupe Mestdagh par Intermarché en est une illustration, qui mécontente surtout les travailleurs, en grève la semaine dernière. La transition numérique en est une autre. À Halle, Colruyt teste des caisses à intelligence artificielle, qui permettraient d’économiser 20 % de temps lors du passage à la caisse. OKay Direct ouvre de son côté un second magasin automatique en ­Flandre. Tous les achats sont enregistrés sur base de la détection du prélèvement des produits dans les rayons. Des changements de stratégie qui ne devraient malheureusement pas induire de baisse des prix.

Des courses plus humaines

Depuis cinq ans, le nombre de magasins de proximité est en constante augmentation. La pandémie a encore davantage accéléré la tendance. Selon Locatus, spécialiste de l’immobilier commercial, les trois principaux acteurs (Carrefour, Delhaize, Colruyt) ont ouvert 86 points de vente en cinq ans. Pour Pauline Neerman, “la tendance est clairement celle du commerce de proximité”. Pendant la pandémie, les Belges ont acheté plus localement, même si Carrefour Express ou Proxy Delhaize sont un peu plus chers que les hypermarchés de ces mêmes groupes. “Les consommateurs veulent retrouver des espaces à taille plus humaine.

Comparer avant d’acheter

Christophe Echement (PingPrice) n’a qu’un conseil: comparer les prix. Certaines denrées sont moins chères dans une enseigne, et d’autres chez un concurrent. Ne mettez donc pas tous vos œufs dans le même panier. Il conseille aussi de se tenir informé des promotions dont les apps des distributeurs vous alertent. Christophe Echement voudrait aller plus loin et proposer une fonctionnalité inédite: scanner dans PingPrice l’ensemble de son panier et observer combien il coûterait chez un concurrent, ou un an auparavant. “On parle toujours du “panier des ménages”, à ­partir du printemps, chacun pourra examiner concrètement sa situation personnelle”, se réjouit l’entrepreneur.

L’anecdote

C’est un drame belge… Selon Test Achats, les produits dont le prix a le plus augmenté sont… les frites surgelées (+ 51 %) et
le poulet à rôtir (+ 42 %). Les repas du dimanche midi n’ont plus la même saveur.

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