Comment les vols de vélos sont devenus un véritable fléau à Bruxelles

Le nombre de vélos volés atteint des chiffres mirobolants, reflet de l'appétit des malfaiteurs qui rivalisent de techniques pour arriver à leurs fins.

Illustration d’un vélo ©BelgaImage

C'est la hantise des cyclistes: laisser son vélo attaché dans la rue et découvrir après qu'il a disparu. Le phénomène est loin d'être anecdotique. La police fédérale déclare que 26.714 vélos ont été volés en Belgique en 2021, et ce chiffre pourrait être légèrement dépassé en 2022. Une bonne partie de ce total viendrait de la région bruxelloise, puisqu'on y comptait en 2019 pas moins de 4.391 vols. Et ça, ce ne serait que le sommet de l'iceberg. Pour la capitale, en estimant que seul un tiers des cas sont déclarés, on atteindrait près de 15.000 vols par an. De la même manière, à l'échelle nationale, le compteur pourrait exploser et frôler la barre des 100.000 d'après la RTBF, soit près de 300 par jour. Bref, un véritable fléau. Et si vous pensiez vous protéger avec une série de cadenas ou d'autres dispositifs de sécurité, vous pourriez être déçu. Les voleurs sont devenus tellement habiles qu'ils commettent leurs méfaits avec une facilité déconcertante. Les forces de l'ordre remarquent même ces derniers temps de nouvelles tendances à Bruxelles.

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Les vélos haut de gamme particulièrement ciblés

En se penchant sur le sujet, l'émission #Investigation a pu constater voler un vélo représentait un "jeu d'enfant". Aucun cadenas ne résiste à une disqueuse sur batterie et s'il y en a plusieurs, "un voleur déterminé n’abandonnera pas sa proie pour autant". Plus un deux-roues à de la valeur, plus l'appétit des malfaiteurs est grand. Interrogé par La Libre, un livreur à vélo, Léo, a pu le constater. Il n'avait pas trop ce souci jusqu'à ce qu'il décide à utiliser des vélos haut de gamme. Depuis, il s'est fait voler trois fois.

Interrogé par la VRT et Bruzz, le porte-parole de la zone de police Bruxelles Capitale Ixelles confirme que certains types de vélos sont plus visés que d'autres. "Beaucoup semblent être volés sur commande", déclare-t-il. En atteste une action des forces de l'ordre qui ont saisi toute une série de vélos volés dans un dépôt. Il s'est avéré qu'il n'y avait aucun vélo longtail, pourtant omniprésent dans la capitale. "Cela indique que nous avons affaire à des gangs professionnels avec leur propre réseau". Ces gangs seraient ainsi attirés par les exemplaires les plus chers, qu'ils enverraient en un rien de temps à l'étranger. La RTBF confirme de son côté que les plus beaux modèles prennent souvent la direction de l’Europe de l’Est ou en Afrique du Nord.

Dans les espaces publics ou privés, des vols de vélos partout

Mais cela ne veut pas dire que les vélos plus bas de gamme seraient épargnés. Nombreux sont ceux qui sont revendus en Belgique, via des sites comme Marketplace ou 2ememain.be. La majorité des vols ne sont d'ailleurs pas le fait de gangs mais d'"opportunistes" qui volent les deux-roues qu'ils croisent afin de se faire de l'argent rapidement. D'après La Libre, certaines communes de la capitale comme Bruxelles-ville et Ixelles seraient particulièrement touchées par le phénomène. Plus globalement, Bruzz et la VRT précisent qu'une bonne partie des vols ont lieu près des gares, des stations de métro, des cinémas et des zones piétonnes. Certains sont même commis devant les passants qui souvent ne réagissent pas. Et lorsque ces derniers interpellent les malfaiteurs, ceux-ci prétextent d'avoir perdu la clé.

Face à ce problème, les Bruxellois prennent de plus en plus l'habitude de ne pas laisser leurs vélos sur la voie publique mais dans des lieux privés. Ils pensent pouvoir les mettre en sécurité mais malheureusement, la police bruxelloise constate qu'un "changement est en cours". Les voleurs s'adaptent à ce nouvel obstacle, par exemple en "suivant un vélo coûteux jusqu'au garage où il est entreposé" avant d'y pénétrer par effraction pour le dérober. "Mais il arrive aussi que des voleurs qui planifient un cambriolage entrent par effraction dans le garage et trouvent un vélo comme premier objet sur leur chemin", confie-t-elle aux médias flamands. Puisqu'une telle prise constitue déjà une réussite lorsqu'il s'agit d'un modèle haut de gamme, les cambrioleurs se contentent parfois de ça et partent sur le champ avec.

Que faire pour arrêter le phénomène?

La question pour les autorités, c'est de savoir comment endiguer cette vague de vols qui n'en finit pas. L'enjeu n'est pas négligeable. Non seulement il s'agit de restituer les biens à leurs vrais propriétaires, mais à plus large échelle, le but est aussi de ne pas mettre à mal les plans de mobilité verte qui misent sur la multiplication des vélos. #Investigation note que "Elke Van den Brandt, la ministre bruxelloise (Groen) de la Mobilité le constate amèrement, 30 % des cyclistes ayant subi un de vol de vélo (principalement électrique) n’en rachètent plus". Ceux-ci sont découragés par le prix de rachat mais aussi par le coût des assurances qui flambe, certaines refusant même de couvrir les vols sur la voie publique dans la région bruxelloise.

Tout le monde est donc d'accord: il faut réagir, mais pour l'instant les résultats sont mitigés. La zone de police Bruxelles Capitale Ixelles estime auprès des médias flamands avoir pu restituer 65 vélos en 2022 via sa page Véloflic, et 200 autres par ailleurs. Mais cela reste loin du total de 1.570 vols signalés, sans compter ceux qui n'ont pas fait l'objet d'une plainte. Un projet dénommé U-Lock devrait permettre d'harmoniser les actions des six zones de police bruxelloises pour une meilleure gestion à l'avenir. Ajoutons à cela le recours à la technique du "vélo-appât" pour filmer les malfaiteurs en pleine action et ainsi les pister jusqu'au lieu du recel, ainsi que la multiplication des box à vélos dans les rues.

Un autre problème est également pointé du doigt: lorsqu'un voleur est arrêté, celui-ci doit être solvable et domicilié en Belgique pour être véritablement condamné, "ce qui est rarement le cas", note la RTBF. "C'est l'un des facteurs qui font du vol de vélos une activité sûre", regrette également la zone de police Bruxelles Capitale Ixelles auprès de la VRT et de Bruzz. "Les vélos valent de plus en plus, le risque de se faire prendre n'est pas si grand et si cela se produit, il n'y a pas de conséquences graves".

Dans tous les cas, les forces de l'ordre incitent à porter plainte dès qu'un vol est constaté et de partager un maximum d'informations à ce propos. Des communes proposent également de graver un numéro de registre sur le vélo, ce qui serait encore plus efficace qu'un sticker. Bruxelles Mobilité a rassemblé toutes les informations sur une page internet pour détailler ce qui peut être fait pour éviter que son deux-roues soit volé, ainsi que ce qu'il faut faire si cela arrive malgré tout. Les autorités espèrent ainsi limiter le phénomène. Pour l'instant, selon #Investigation, seuls 5% des vélos déclarés volés retrouvent leurs propriétaires.

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