La vérité sur la grossophobie

La grossophobie reste un tabou énorme en 2020. La Une de Télérama, censurée par les réseaux sociaux, en témoigne. Un documentaire ce mercredi sur la RTBF décortique les enjeux. Focus sur un racisme très souvent banalisé.

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Cachez ce bourrelet que Mark Zuckerberg ne saurait voir. Les réseaux sociaux Facebook et Instagram ont été critiqués depuis jeudi 6 février pour avoir retiré de leur plateforme des publications d'internautes partageant la une du dernier numéro du magazine Télérama, consacré à la question de la grossophobie. La première page du périodique, sur lequel s'affiche le titre "Pourquoi on rejette les gros ?", présente une photo de la DJ et militante Leslie Barbara Butch, qui pose nue pour le photographe Jérôme Bonnet.

La grossophobie est cette forme de discrimination particulière à l’encontre des personnes obèses ou en surpoids et qui semble plus souvent viser les femmes. Le terme a été inventé en 1996 par l’actrice française Anne Zamberlan dans son livre Coup de gueule contre la grossophobie qu’elle définit comme une aversion ou une attitude hostile envers les personnes en surpoids”. Deux décennies plus tard, le combat est loin d’être fini. Le terme grossophobie est entré dans le dictionnaire à peine en 2018.

Discriminations et violences

Gourmands, paresseux, bons à rien, puants, bêtes… Les préjugés à propos des gros sont coriaces. Et les conséquences sont rudes. La militante Daria Marx pointe le harcèlement scolaire (63% des enfants obèses risquent d’en être victimes), la discrimination à l’embauche, la violence médicale et le manque d’infrastructures adaptées. La grossophobie médicale est fréquente et ne fait qu’empirer les choses. Matériel médical inadapté, remarques désobligeantes, voire erreurs de diagnostic…, certain.e.s n’osent plus se rendre chez le médecin.

Le raccourci facile selon lequel “gros = mal manger” est en effet très fréquent, alors que les choses s’avèrent bien plus complexes: Une personne obèse ou en surpoids ne mange pas forcément mal. Elle mange ou elle a mangé a priori un peu trop à un certain moment par rapport à ses besoins. Ça ne veut pas dire qu’elle le fait là maintenant. Et ça ne veut pas dire qu’elle mange mal. La qualité est importante en matière de santé. En termes de poids, c’est plutôt la quantité qui va primer, explique Émilie Bazin, diététicienne et nutritionniste formée à la méthode du GROS (Groupe de réflexion sur l’obésité et le surpoids).

"Qui a pu baiser cette grosse truie?"

Un documentaire décortique ce mercredi soir les enjeux de ce tabou. Fille de la comédienne Michèle Bernier et de l’auteur Bruno Gaccio, l’actrice Charlotte Gaccio,dans un documentaire prenant, part à la rencontre de spécialistes de tout bord: généticiens, militants, mais aussi un sociologue expert en représentations du corps ou encore un essayiste d’extrême droite persuadé qu’il faut lutter contre l’obésité avant de combattre les discriminations. L’idée? Comprendre l’origine, les causes et les contours de la grossophobie.

"Été 2017, je suis enceinte de jumeaux et je décide de partager mon bonheur en annonçant la nouvelle sur Instagram. Le lendemain, je tombe sur un article sur Internet: ‘Charlotte Gaccio, bientôt maman de jumeaux’. À la fin de l’article, je découvre qu’il y a déjà des dizaines de commentaires anonymes sur le sujet: “Putain ! Qui a bien pu vouloir baiser cette grosse truie?”, À 40 ans, avec encore 20 kilos de plus, elle fera un sketch intitulé Larguée, comme sa grosse de mère”C’est la douche froide, je suis sous le choc, en larmes pendant des heures. J’ai connu des humiliations au sujet de mon poids, mais c’est vraiment la première fois où j’ai ressenti, le plus violemment de ma vie, que pour certains, je n’étais qu’une grosse. Pour tenter de comprendre les discriminations que peuvent subir d’autres personnes grosses comme moi, j’ai accepté de mener une enquête. ”

no "Pourquoi nous détestent-ils, nous les gros?" Mercredi  19 LA UNE 20H15

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