
Les peines de moins de 3 ans ne sont pas (toujours) exécutées

Le flou juridique persiste. D'ordinaire cependant, les peines inférieures ou égales à 3 ans d'emprisonnement ne sont pas exécutées. Elles sont remplacées par une surveillance électronique. La chercheuse FNRS de l'Université Saint-Louis et membre de la commission surveillance de la prison de Forest-Berkendael Olivia Nederlandt nuance un peu cette prétendue vérité: "Parfois, on fait une partie de peine en bracelet électronique sans jamais aller en prison. Mais les gens oublient que les gens concernés par la justice pénale ont souvent plusieurs dossiers à leur actif. C'est logique vu que s'il n'y a qu'un seul dossier, les parquets classent souvent sans suite. Or quand il y a plusieurs dossiers, ces derniers ne sont pas forcément traités en même temps et par les mêmes juges. Donc les peines se cumulent et peuvent dépasser les 3 ans de détention. C'est donc faux de dire qu'on n'exécute pas les peines de moins de 3 ans, car beaucoup de personnes cumulent des peines de moins de 3 ans."
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Cette croyance populaire aurait des effets pervers. "Elle conduit les juges à prononcer les fameuses peines de "37 mois", poursuit la spécialiste. Ces dernières sont en effet très fréquentes (Le 28/10: condamnation d'un Hell's Angel à 37 mois ; le 18/10: même tarif pour l'auteur d'une bagarre dans le Jardin de la Reine ; le 15/10: pareil pour d'un agresseur de trois contrôleurs des TEC ; etc.). "En prenant cette décision, les juges s'assurent ainsi que le condamné passera au mois quelques mois derrière les barreaux et n'aura pas d'office un bracelet électronique. Mais ça conduit à ce qu'on prononce des peines de plus en plus longues…"
Fin de la conversion automatique
Le ministre de la Justice Koen Geens a travaillé sur une réforme visant à en finir avec le flou qui persiste pour les courtes peines. La dernière commission Justice de la législature en avril dernier a approuvé sa proposition de loi selon laquelle les peines d'emprisonnement inférieure ou égale à trois ans relèveraient de la compétence du pouvoir judiciaire, et ne seraient plus automatiquement converties en surveillance électronique (ce qui n'est pas le cas lors d'un cumul de peines, donc). "Mais le gouvernement n'a pas déposé les arrêtés royaux nécessaires à la Chambre pour appliquer cette partie de la loi, commente Olivia Nederlandt. On a donc un système organisé par des circulaires de ministres non-publiées. Actuellement, aucun juge n'intervient et n'y a pas de suivi ni encadrement pour ces personnes. Désormais, on est en affaire courante… Il faudra donc patienter pour qu'une réforme entre en vigueur." Elle termine: "On a un Code pénal et un Code d'instruction criminelle, mais pas de code qui détermine comment on exécute les peines, comment on suit les condamnés. On en a absolument besoin pour savoir quand une personne peut demander à être libérée sous conditions, ce qui se passe si plusieurs peines se cumulent. Etc."