
Christchurch : terrorisme ne rime pas seulement avec djihadisme

"Le terrorisme d’extrême droite est une menace à prendre au sérieux pour les temps à venir. Et il faut aussi tenir à l’œil le terrorisme anarchiste”, professe Michaël Dantinne, criminologue à l’ULiège et expert des questions terroristes. L’attaque tragique en Nouvelle-Zélande ce 15 mars contre deux mosquées, qui a fait 50 morts, en a rappelé la nécessité. Elle n’est pourtant pas nouvelle. Elle prend racine, entre autres, aux États-Unis depuis la fondation du Ku Klux Klan, en 1865. Elle s’appuie sur la thèse du “Grand Remplacement” (voir ci-contre).
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Mais depuis les attentats du 11 septembre, l’expression “terrorisme” a été essentiellement assimilée aux groupes islamistes radicaux. “Beaucoup d’analystes – qu’ils soient des services secrets ou des experts – considèrent que ce terrorisme d’extrême droite est la forme émergente du terrorisme pour les années à venir en parallèle au terrorisme islamiste. Ce n’est pas son alter ego mais c’est une menace réelle”, analyse Michaël Dantinne.
Des attaques associées directement à l’extrême droite sont en réalité enregistrées chaque année dans les pays occidentaux depuis celles du Norvégien Anders Behring Breivik (77 morts en juillet 2011), qui avait fait exploser une bombe près du siège du gouvernement à Oslo avant d’ouvrir le feu sur un rassemblement de la Jeunesse travailliste sur l’île d’Utøya. Or, l’attentat perpétré par Brenton Tarrant rappelle celui de Breivik. Aujourd’hui, le danger de l’extrême droite est sans doute devenu aussi pressant que celui du djihadisme, notamment avec l’affaiblissement du groupe armé État islamique en Syrie et en Irak, même si les morts de l’attaque d’Utrecht pourraient relativiser ce constat. Mais ce n’est pas la seule raison. “Ce qui vient de se passer doit sonner comme un signal d’alarme qu’un terrorisme anti-islam, nourri dans une idée de grand complot, a pignon sur rue avec des idées pas très éloignées d’une Marine Le Pen ou d’un Éric Zemmour. Des idées qui poussent jusqu’à nos portes”, prévient Michaël Dantinne.
Tout ceci va plus loin. La crainte aujourd’hui est que le terrorisme islamique fasse grandir l’islamophobie et, au bout de cette chaîne haineuse, ce terrorisme d’extrême droite. Michaël Dantinne reste prudent. “Je ne fais pas de prédiction. Mais ces attentats ne vont pas aider à dépolariser le monde. Le fait que des musulmans innocents aient été tués froidement dans leur lieu de culte ne va faire que crisper les relations. Cela peut raviver l’idée auprès des musulmans qu’ils sont une population ciblée.”
Pour l’expert, cela ne va pas pour autant entraîner une réaction même si de “petites menaces opportunistes ont déjà vu le jour”. Entre le terrorisme islamiste et d’extrême droite, il n’y a pas pour autant de compétition. “Ils gagnent tous les deux. Les gens se recroquevillent. Et ils peuvent même trouver un terrain d’entente en visant les juifs comme ennemi commun.”
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